Matériaux pour la Flore du Sahara : le genre Fagonia
Un dossier rassemblé par Claude Lemmel & Jean-Paul Peltier
avec la participation de Cyrille Chatelain
et des photographies de Zahora Attioui/atlas-sahara.org, Abdelkader Nabil Benghanem, Salima Benhouhou, Cyrille Chatelain, Gérard De Belair, Annie Garcin/teline.fr, Ph. Geniez/teline.fr, Abdelmonaim Homrani Bakali/teline.fr, Abderrazak Marouf, Florian Mombrial, Fouad Msanda/teline.fr, JC Thiaudière/teline.fr .
Les botanistes du XVIIIe au XXe siècles ont travaillé à une époque où les ressources scientifiques étaient concentrées dans quelques universités ou muséums disposant d'une bibliothèque et d'un vaste herbier.
Les livres étaient rares et chers. La plupart des botanistes n'avaient dans leur herbier personnel que les plantes qu'ils avaient récoltées eux-mêmes.
Pour l'Afrique du Nord, cette période a culminé avec le gigantesque travail de René Maire et sa monumentale "Flore de l'Afrique du Nord" hélas inachevée.
Les successeurs immédiats de Maire ont pu produire dans la continuité de son travail des flores pour la Tunisie (Pottier-Alapetite, 1979-1981, puis catalogue synonymique commenté par Le Flo'ch et al., 2010), l'Algérie (Quézel & Santa, 1962-1963), le Sahara (Ozenda, 1977-2004), la Mauritanie (Barry & Celles, 1991) et enfin le Maroc (Fennane et al., 1999-2014).
Le XXIe siècle a complètement changé la donne avec l'arrivée d'Internet, de l'imagerie numérique et de la possibilité de travailler en équipe à distance.
Une bibliothèque électronique comme Biodiversity Heritage Library (BHL - www.biodiversitylibrary.org) s'enrichit de jours en jours et met à la disposition de tous une part croissante de la littérature botanique mondiale depuis la Renaissance jusqu'à aujourd'hui.
Les revues scientifiques autrefois réservées aux grandes institutions sont aujourd'hui pour la plupart accessibles en ligne.
Plusieurs grands herbiers ont été numérisés et sont accessibles sur GBIF (Global Biodiversity Information Facility - www.gbif.org) ou sur le réseau botanique E-Recolnat (recolnat.org).
Des technologies nouvelles et puissantes sont apparues :
- la photographie numérique permet que se constituent dans chaque pays des photothèques botaniques qui sont très utiles pour décrire les plantes, leur anatomie et leur écologie ;
- des bases de données comme GBIF ou APD (African Plant Database - africanplantdatabase.ch) donnent accès à des index synonymiques et à des cartes de répartition ;
- les techniques de biologie moléculaire apportent un regard nouveau sur la classification des espèces. Les progrès méthodologiques (cladistique, traitement informatique des données) et techniques (banalisation des séquençages d'ADN, puissance des ordinateurs) permettent d'élaborer des hypothèses phylogénétiques de plus en plus robustes.
Les flores de demain seront donc :
- numériques : elles utiliseront toutes les ressources de l'informatique et de l'internet ;
- ouvertes : elles seront accessibles librement et gratuitement à tous ;
- encyclopédiques : elles pourront s'alimenter à toutes les sciences qui constituent la botanique : taxinomie, biologie, agronomie, biogéographie, ethnobotanique...
Elles seront enfin collaboratives. Autrefois un auteur scientifique devait avoir achevé son oeuvre pour la faire imprimer et ensuite recevoir les critiques de ses collègues. Il est aujourd'hui possible de mettre en ligne un travail en cours d'élaboration et de bénéficier des critiques ou des apports de la communauté botanique en temps réel.
C'est dans cette démarche que s'inscrit ce premier dossier "Matériaux pour la Flore du Sahara" sur le genre Fagonia (Zygophyllaceae). Nous n'avons ni la compétence, ni la prétention de refaire à nous seuls une nouvelle Flore du Sahara. Notre projet est de permettre une synthèse des connaissances et de proposer des pistes pour le travail de terrain ou pour la recherche scientifique. Ce travail ne cherchera pas à apporter des réponses, mais déjà à essayer de poser les bonnes questions.