Al Yasmina n°1 (2020)Archives : Battandier & Trabut - 1/2
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Jules Aimé Battandier (1848-1922)
& Louis Charles Trabut (1853-1929)

Jules Aimé Battandier (1848-1922) & Louis Charles Trabut (1853-1929) étaient professeurs de botanique à la Faculté de médecine et de pharmacie d’Alger.

Ces collègues étaient aussi des amis et ils ont fait oeuvre commune en publiant d’abord une Flore d’Alger en 1884, étendue pour devenir une Flore de l’Algérie en 1888-1895 et enfin une Flore synoptique de l’Algérie et de la Tunisie en 1902.

René Maire leur a consacré des notices biographiques :

Jules Aimé Battandier (1848-1922)
Notice biographique.pdf

Flores publiées par Battandier & Trabut

Battandier - Trabut, 1886-1913 - Atlas de la flore d'Alger fasc1-4

Diagnoses et illustrations : Ophrys atlantica Munby, Riella cossoniana Trabut, Fossombronia corbulaeformis Trabut, Carduncellus pomelianus Battandier, Buffonia duvaljouvii Battandier & Trabut, Ononis avellana Pomel, Campanula serpylliformis Battandier, Enthosthodon mustaphae Trabut, Pottia chottica Trabut, Riella clausonis Letourneux, Vicia fulgens Battandier, Limodorum trabutianum Battandier, Centaurea malinvaldiana Battandier, Podanthum aurasiacum Battandier & Trabut, Astragalus nemorosus Battandier, Lathyrus numidicus Battandier, Thlaspi atlanticum Battandier & Trabut, Aethionema thomasianum J. Gay, Biscutella brevicalcarata Battandier & Trabut, Salsola zygophylla Battandier & trabut, Allium massaessylum Battandier & Trabut, Genista spinulosa Pomel, Platanthera algeriensis Battandier & Trabut, Saxifraga baborensis Battandier, Brassica souliei Battandier, Rapistrella ramosissima Pomel, Salvia balansae De Noe, Marsilia diffusa A. Braun f. Algeriensis, Enathrocarpus chevallieri Barratte, Silene claryi Battandier, Hedysarum mauritanicum Pomel, Myrtus nivelli Battandier & Trabut, Senecio hoggariensis Battandier & Trabut, Atractylis delicatula Battandier, Atractylis aristata Battandier, Carduncellus reboudianus Battandier, Carduncellus duvauxii Battandier, Zollikoferia anomala Battandier, Hypochaeris saldensis Battandier, Glossonema gautieri Battandier & Trabut, Echium horridum Battandier, Lafuentea ovalifolia Battandier & Trabut, Salvia chudaei Battandier & Trabut, Salvia pseudo-jaminiana Chevallier, Thymus satureoides Cosson, Boerhaavia pachypoda Battandier & Trabut, Nucularia perrini Battandier, Ficus teloukat Battandier & Trabut, Ficus eucalyptoides Battandier & Trabut, Urginea noctiflora Battandier & Trabut, Pancratium saharae Cosson, Abies numidica De Lannoy, Exormotheca welwitschii Stephani

Battandier, Maire - Trabut, 1920 - Atlas de la flore d'Algérie fasc5

Diagnose & illustration : Moricandia foleyi, Iberis peyerimhoffii, Erodium battandieranum, Adenocarpus bacquei, Liauteya ahmedi, Trianthema pentandrum var. hirtulum, Pituranthos battandieri, Scabiosa parielii, Jasiona sericea, Withania adpressa, Linaria micromerioides, Boerhaavia agglutinans

Notes publiées en commun par Battandier & Trabut

Battandier - Trabut, 1892 - Voyages botaniques en Algérie - Deuxième partie - Diagnoses

Diagnoses : Thlaspi atlanticum, Lactuca numidica, Atriplex chenopodioides, Salsola zygophylla, Salsola spinescens, Allium massaessylum, Platanthera algeriensis

Battandier - Trabut, 1906 - Plantes du Hoggar récoltées par M. Chudeau en 1905

Diagnose & illustration : Farsetia chudaei, Zizyphus saharae, Astragalus chudaei, Astragalus gautieri, Deverra fallax, Pulicaria alveolosa, Pulicaria chudaei, Glossonema gautieri, Lafuentea ovalifolia, Anticharis brevipes, Salvia chudaei, Boerhaavia pachpoda, Aristida hoggariensis

Battandier - Trabut, 1913 - Plantes du Tassili des Azdjer

Diagnoses & illustrations : Trianthema pentandrum L. var. hirtulum, Jasonia sericea , Linaria micromerioides , Boerhaavia agglutinans, Nananthea tassiliensis

Notes de Battandier

Notes de Trabut

Al Yasmina n°1 (2020)Archives : Battandier & Trabut - 2/2

Les plantes sahariennes souffrent-elles plus que les autres de la sécheresse ?

Jules Aimé Battandier - 1909

* Les espèces dont le nom scientifique a changé depuis Battandier sont suivies d’une * ; un index synonymique en est donné à la fin de l’article.

Au premier abord cette question paraîtra bizarre. Comment pourrait-il en être autrement dans un pays où la sécheresse empêche presque toute végétation, où les pluies sont si rares et si irrégulières, et où l’atmosphère est si sèche ? Mais il ne faut juger de rien a priori, et la question mérite d’être étudiée de plus près.

Je laisserai de côté les plantes irriguées des oasis et toutes celles qui poussent au voisinage de l’eau.

Dans le cours de ma carrière botanique, il m’est arrivé souvent de cultiver ou de voir cultiver à Alger des plantes désertiques. Au début, je m’attendais à leur voir prendre un développement luxuriant, comme cela m’était arrivé pour d’autres plantes réfugiées (Bull. Soc. bot. Fr. 1887, p. 190). Les résultats furent tout autres.

Le Salsola zygophylla Batt., parmi les plantes vivaces, et le Neurada procumbens L., parmi les plantes annuelles, ont végété à Alger péniblement et misérablement. Protégés contre toute concurrence, ils n’en ont pas moins disparu rapidement : quelque chose évidemment leur manquait. Le Lepidium subulatum, l’Hedysarum carnosum, les Artemisia Herba-alba et campestris, le Zollikofera* arborescens, le Statice* pruinosa, le Limoniastrum Guyonianum ont bien poussé et duré plus ou moins longtemps mais sans exagérer leurs proportions.

Le Retama Raetam et le Warionia Saharae se sont maintenus de longues années, ni plus ni moins vigoureux que dans leur station d’origine. Le Warionia, venu de graines, n’a pas, pendant dix ans, produit un seul fruit fertile et a fini par périr.

Même dans ses stations d’Algérie, les fruits sont très rarement fertiles. Je ne crois pas cependant qu’il se multiplie autrement que de graines.

Le Retama Bovei*, des sables maritimes de Mostaganem, s’est comporté différemment, bien que très voisin spécifiquement. Cultivé au jardin botanique des Écoles supérieures, il y est devenu un arbre véritable, atteignant rapidement 8 mètres de haut, et a du être rabattu pour cause d’encombrement.

Le Pancratium Saharae* Cosson et l’Urginea noctiflora* Batt. et Trabut ont bien fleuri l’année qui a suivi leur transplantation, grâce aux réserves de leur bulbe, puis celui-ci a fondu, presqu’aussitôt pour l’Urginea*, au bout d’un temps plus ou moins long pour les Pancrais, mais sans nouvelle floraison.

Le Trichodesma calcaratum Cosson, cultivé par cet auteur dans sa propriété de Thurelles, y a cependant pris un développement exubérant, il en a été de même à un degré moindre au jardin des Écoles pour les Statice Bonduelli* Lestib. et pyrrholepis* Pomel.

Les plantes du désert ne sont pas en général des plantes anémiées, beaucoup ont un aspect plutôt plantureux. Le Capparis spinosa L. est représenté dans le désert, même très intérieur, par une variété plus robuste que celles du littoral.

L’Eruca sativa L. s’y trouve remplacé par deux sous-espèces plus robustes: l’Eruca pinnatifida Desf. (sub Brassica), et l’E. aurea Batt. Il en est de mème du Moricandia suffruticosa et du Bupleurum spinosum à El Kantara.

Dans les Résédacées désertiques, les Reseda villosa Cosson et Alphonsi DC. comptent parmi les plus puissants représentants de ce genre. Le Randonia africana et le Caylusea canescens* sont de grandes et fortes plantes. Le Reseda arabica n’est pas fort inférieur aux autres représentants du groupe du R. Phyteuma. M. l’abbé CHEVALIER a centurié du Mzab des formes particulièrement robustes de l’Helianthemum sessiliflorum*. Les Phelipaea lutea* et violacea* qui s’avancent fort loin dans le Sud sont des géants dans leur genre.

Le Peganum harmala L., le Zizyphus Lotus*, le Rhus oxyacanthoides*, qui existent dans le Tell et au Sahara, ne sont pas moins robustes dans cette dernière station.

En général, la végétation du Sahara, tant algérien qu’intérieur, compte des plantes plutôt robustes : Cleome arabica, Diplotaxis virgata, Schouwia arabica*, Polygala erioptera, Genista Saharae*, Astragalus gombo, A. gombiformis, A. akkensis, A. tragacanthoides*, les Sénés, les Zygophyllum, Nitraria tridentata*, Salvadora persica, Balanites aegyptiaca*, Tamarix divers, Acacia tortilis, Leptadenia pyrotechnica, Deverra intermedia*, Carducellus eriocephalus*, Carduus Chevallieri, Onopordon arenarium*, Andryala Chevallieri, Lavandula stricta*, Saccocalyx satureioides, Calligonum comosum*, beaucoup de Salsolacées, etc., etc.

Les membres de la Société botanique de France qui sont venus en 1906 dans le Sud oranais n’auront sans doute pas oublié la vigoureuse végétation de Ben Zireg. Il est vrai qu’il y avait eu cette année là des pluies abondantes.

Il y a bien au Sahara des plantes naines : Asteriscus pygmaeus*, Gymnarrhena micrantha, Megastoma pusillum*, etc. ; mais, mème dans leur exiguïté, ces plantes ne manquent pas de vigueur. On n’y trouve point de ces petites plantules anémiées qui se maintiennent en Europe sur les pelouses arides. Une pareille population serait vite anéantie par le sirocco, L’action désertique se fait bien plus sentir par la raréfaction des plantes que par leur émaciation.

Un très grand nombre de plantes sahariennes, surtout dans la Hamada, ont dû réduire au minimum leur dépense en eau, soit par suppression plus ou moins complète de leur feuillage : Deverra, Alhagi, Leptadenia, Calligonum, Statice pruinosa* ; soit par la diminution de leur surface foliaire : Lepidium subulatum, Argyrolobium uniflorum, Leysera capillifolia, etc. ; soit par l’épaississement de la cuticule, ou la production d’enduits cireux ou salins, soit par d’autres procédés ; mais, une fois ces réductions opérées, un bon équilibre semble s’établir entre les recettes et les dépenses, et les plantes paraissent en parfait état.

Les Deverra sahariens, les Calligonum, les Ephedra paraissent très vigoureux.

On a quelquefois prétendu qu’au Sahara la perte d’eau par évaporation l’emportait prodigieusement sur les recettes. S’il en était ainsi, le désert se dessécherait de plus en plus et très rapidement. Je crois bien qu’il s’y produit une modification dans ce sens, mais très lente. L’air y est généralement très sec et très chaud l’été, l’évaporation serait certainement énorme s’il y avait de l’eau à évaporer ; mais le sol aussi y est très sec et très avide d’eau, et cette avidité se trouve encore augmentée par les sels déliquescents qu’il contient. Souvent, au lieu de céder de l’eau à l’atmosphère, il doit lui en soutirer, de sorte que les recettes sont mal connues. Certaines plantes couvertes d’enduits salins prennent directement la vapeur d’eau à l’air. Cela a été démontré pour le Reaumuria arabica.

Le sol du Sahara, peu épuisé par une végétation fort rare, jamais lavé par les pluies, est très fertile. S’il manque d’humus, il est riche en engrais salins.

Aussi, dès qu’il pleut, il se produit une végétation assez abondante de plantes annuelles à développement très rapide : Sisymbrium, Diplotaxis, Ammosperma, Alyssum divers, Meniocus linnifolius*, Notoceras canariense*, Erodium cicutarium et pulverulentum, Malva aegyptiaca*, Althaea ludwigii, Orlaya maritima*, Daucus divers, Ammodaucus leucotrichus, Scabiosa arenaria*, des Filago, des Anthemis, des Atractylis, des Linaires, des Plantains, Atriplex dimorphostegius*, Rumex vesicarius et voisins, Asphodelus pendulinus*, etc., etc. Ces plantes ont ordinairement le temps de mûrir leurs graines avant la dessiccation complète du sol.

Certaines, comme le Rumex vesicarius, ont des tissus fort tendres, et je ne serais pas étonné qu’elles ne fussent pas plus adaptées à la sécheresse que les plantes du désert de Kaits dont parle DE VRIES (Espèces et variétés, traduction BLARINGHEM, p. 283).

La dune élevée n’a généralement de végétation que vers sa base. Or, à cette base, il y a généralement de l’eau, parfois des sources. Les racines des plantes arénicoles pénétrant rapidement à une grande profondeur trouvent souvent de l’eau ou de l’humidité. Beaucoup de plantes annuelles, sans racines extraordinaires, s’y trouvent également bien : Senecio coronopifolius, Crepis suberostris*, etc.

Dans la Hamada on trouve surtout des plantes vivaces profondément enracinées aussi. Beaucoup deviennent ligneuses, même dans des familles où les plantes ligneuses sont rares. Dans les Crucifères: Farsetia linearis*, F. aegyptiaca, Vella cytisoides*, V. glabrescens*, Zilla myagroides*, Z. macroptera*, Henophyton deserti, Moricandia divaricata* ; dans les Composées : Warionia Saharae, Anvillea radiata*, les Rhanterium, etc.

Le Sahara ne nourrit que bien peu de plantes cactoïdes : Apteranthes Gussoneana* et quelques Euphorbes à l’Est et à l’Ouest; mais les plantes à feuilles charnues n’y sont pas très rares. Le Mesembryanthemum crystallinum devient extraordinairement encombrant dans les oasis du Sud tunisien.

NOMS UTILISÉS PAR BATTANDIER NOMS ACTUALISÉS DE L’AFRICAN PLANT DATABASE (GENÈVE)

Anvillea radiataAnvillea garcinii subsp.radiata (Coss. & Durieu) Anderb.
Apteranthes GussoneanaApteranthes europaea (Guss.) Murb. var.europaea
Asphodelus pendulinusAsphodelus refractus Boiss.
Asteriscus pygmaeusPallenis hierichuntica (Michon) Greuter
Astragalus tragacanthoidesAstragalus tragacantha L.
Atriplex dimorphostegiusAtriplex dimorphostegia Kar. & Kir.
Balanites aegyptiacaBalanites aegyptiacus (L.) Delile
Calligonum comosumCalligonum polygonoides subsp.comosum (L’Hr.) Soskov
Carduncellus eriocephalusCarthamus eriocephalus (Boiss.) Greuter
Caylusea canescensCaylusea hexagyna (Forssk.) M. L. Green
Crepis suberostrisCrepis arenaria subsp.suberostris (Batt.) Greuter
Deverra intermediaDeverra triradiata subsp.intermedia (L. Chevall.) Pfisterer & Podlech
Farsetia linearisFarsetia occidentalis B. L. Burtt
Genista SaharaeCalobota saharae (Coss. & Dur.) Boatwr. & B.-E. van Wyk
Helianthemum sessiliflorumHelianthemum lippii (L.) Dum. Cours.
Lavandula strictaLavandula coronopifolia Poir.
Leysera capillifoliaLeysera leyseroides (Desf.) Maire
Malva aegyptiacaMalva aegyptia L.
Megastoma pusillumOgastemma pusillum (Coss. & Durieu ex Bonnet & Barratte) Brummitt
Meniocus linifoliusAlyssum linifolium Willd.
Moricandia divaricataMoricandia spinosa Pomel
Nitraria tridentataNitraria retusa (Forssk.) Asch.
Notoceras canarienseNotoceras bicorne (Aiton) Amo
Onopordon arenariumOnopordum arenarium (Desf.) Pomel
Orlaya maritimaPseudorlaya pumila (L.) Grande
Pancratium SaharaePancratium trianthum Herb.
Phelipaea luteaCistanche lutea (Desf.) Hoffmanns. & Link
Phelipaea violaceaCistanche violacea (Desf.) Hoffmanns. & Link
Reseda AlphonsiReseda alphonsii Mll. Arg.
Retama BoveiRetama raetam subsp.bovei (Spach) Talavera & Gibbs
Rhus oxyacanthoidesSearsia tripartita (Ucria) Moffett
Scabiosa arenariaSixalix arenaria (Forssk.) Greuter & Burdet
Schouwia arabicaSchouwia purpurea (Forssk.) Schweinf.
Senecio coronopifoliusSenecio glaucus subsp.coronopifolius (Maire) C. Alexander
Statice BonduelleiLimonium bonduellei (T. Lestib.) Kuntze
Statice pruinosaLimonium pruinosum (L.) Chaz.
Statice pyrrholepisLimonium delicatulum (Girard) Kuntze
Urginea noctifloraVera-duthiea noctiflora (Batt. & Trab.) Speta
Vella glabrescensVella pseudocytisus subsp.glabrata Greuter
Vella cytisoidesVella pseudocytisus L.
Zilla macropteraZilla spinosa subsp.macroptera (Coss.) Maire & Weiller
Zilla myagroidesZilla spinosa (L.) Prantl subsp.spinosa
Zyziphus LotusZiziphus lotus (L.) Lam.
Zollikoferia arborescensLaunaea arborescens (Batt.) Murb.

 Sur les origines du Figuier

Par Louis Charles Trabut - 1922

Il est généralement admis que le Figuier descend, par l’effet de la culture, du Ficus carica L.; mais si par des recherches minutieuses on arrive à la conviction que tous les prétendus Ficus carica spontanés ne sont que des descendants naturalisés des Figuiers cultivés, le pro­blème de l’origine se pose de nouveau demandant une autre solution.

En recherchant dans l’aire très étendue du Ficus carica, des Canaries et des côtes de l’Océan à l’Inde, des stations où le Ficus carica se rencontre à l’état vraiment spontané, on arrive à constater que partout l’indigénat est fort contestable. Le plus grand nombre des flores indique le Ficus carica comme naturalisé ou subspontané.

Dans les parties septentrionales de son aire le Ficus carica ne peut se reproduire, car il est dioïque et ne peut être pollinisé que par le Blastophaga qui n’y a pas été observé. Les sujets de Bretagne et des côtes de l’Océan, bien qu’ayant une allure de plante sauvage, sont seulement des semis accidentels.

Dans les contrées méridionales la symbiose est réalisée; mais les sujets sont très inconstants dans leurs caractères et se rattachent plus ou moins aux variétés cultivées dont ils sont issus; toutes ces innombrables formes assauvagies ne donnent pas l’idée d’une espèce normale avec des caractères bien fixés.

En Asie, le Ficus carica abonde en Anatolie, Syrie, Mésopotamie, en Tauride, en Transcaucasie, Arménie, Perse, Afghanistan, toujours comme dans la Méditerranée, dans des stations fraîches, rocheuses et à proximité de cultures très anciennes et très étendues, les variétés notables sont en grand nombre; Boissier (Flora orientalis) en signale qui sont bien caractérisées par la forme des feuilles ou des fruits. Dans la var. riparum les feuilles sont à lobes très longs spathulés comme dans les Figuiers cultivés dans la région ou encore dans les var. rupestris et globosa, la feuille n’est pas divisée et rappelle la forme morifolia du F. palmata Forsk.

De Candolle dans l’Origine des plantes cultivées éprouvait déjà des doutes sur l’indigénat du Ficus carica: « De nos jours le Figuier est spontané ou presque spontané dans une vaste région dont la Syrie est à peu près le milieu... » L’argument tiré de la présence des formes affines du Ficus carica constatées dans le tertiaire et le quaternaire n’a pas grande valeur, car ces Ficus fossiles peuvent tout aussi bien se rattacher aux autres espèces de la section Carica.

On a aussi évoqué en faveur de l’indigénat du Figuier dans la région méditerranéenne l’absence, en Amérique, de Figuiers subspontanés bien que la culture du Figuier soit déjà ancienne sur le nouveau continent. La culture du Figuier en Amérique n’a produit jusqu’à ces derniers temps que des fruits stériles; mais depuis 1899 il a été introduit des Figuiers mâles et le Blastophaga qui opère la fécondation; et sans aucun doute le Ficus carica sera, avant peu, commun à l’état subspontané comme dans toutes les régions où on consomme des figues fécondées contenant 500 à 800 graines fertiles susceptibles de traverser l’intestin de l’homme et des animaux. 

Dans l’Inde, dans le Punjab on fait, depuis les temps anciens, dans la région montagneuse, d’importantes cultures d’un Figuier du groupe Carica rapporté aux Ficus virgata et F. caricoides Roxb, que Watt rattache au F. palmata Forsk. et dont il dit: « il peut être considéré comme le représentant indien du F. carica; c’est. un arbre de taille moyenne; il croit dans les chaînes de Suliman et de Salt dans le Punjab, dans l’Est du Népaul où il s’élève à 2000 mètres, on le trouve encore au mont Abou; le fruit est mangé par les indigènes; séché et exporté dans les plaines, il mûrit de juin à octobre; les feuilles sont employées à la nourriture du bétail. » (Dict. of Econ. prod. of India).

Au sujet du F. carica le même auteur indique cette espèce comme seulement cultivée dans l’lnde; mais croit que sur bien des points elle a été confondue par les explorateurs avec d’autres espèces du même groupe. Le F. carica n’est pas considéré comme indigène dans l’Inde par Aitchison, qui lui assigne pour patrie l’Afghanistan et la Perse.

Dans la Perse austro-occidentale apparaissent d’autres espèces spontanées bien voisines du F. carica; le F. persica Boiss. (Diagn. et Fl. Or.) Alors que le F. virgata a des feuilles de Mûrier tomenteuses, le F. persica a des feuilles profondément lobées, à lobes spathulés et pubescentes seulement sur les nervures. Dans ces mêmes contrées, Boissier a décrit son F. Johannis (Diagn. 1-7) à feuilles profondément lobées et à fruit velouté, plus tard dans la Flore d’Orient il en fait la var. Ɛ du F. carica. Il semble que le F. Johannis est le résultat du contact du F. persica et du F. virgata Roxb.

En Arabie et Abyssinie, le groupe Carica est bien représenté par des espèces décrites comme certainement spontanées par les botanistes qui ont visité ces contrées. Forskal indique: F. senata, F. palmata, F. morifolia = F. Forskalei Vahl, F. Toka Decaisne, le Ficus pseudo-sycomorus et Deflers 1889 deux espèces nouvelles décrites mais non nommées.

En Abyssinie, on signale le F. pseudo-carica Hochst. et le F. Petitiana Rich.

Ces Ficus de la section Carica sont tous dioïques et seules les figues femelles sont pulpeuses, sucrées et comestibles. Les auteurs qui les ont décrites ont parfois signalé les fruits comme incomestibles; il est probable qu’ils avaient observé seulement les pieds mâles qui portent des fruits en toutes saisons, mais des fruits uniquement adaptés à l’entretien des générations du Blastophaga. Le nombre de ces espèces pourrait probablement être réduit si on en considère quelques-unes comme des espèces secondaires à réunir à des formes affines.

Il est bien probable que les anciens habitants de ces contrées après avoir consommé les figues sauvages ont eu l’idée de cultiver quelques-uns de ces Figuiers, (d’autant plus que la reproduction par semis devait se faire naturellement tout autour des lieux habités, ces figues étant toutes fécondées et les graines traversant facilement le tube digestif.)

Tous les Ficus de ce groupe sont dioïques et la fécondation est effectuée par le même Blastophaga, il devait donc se produire des croisements toutes les fois que deux ou plusieurs espèces se trouvaient en contact.

Ce contact a du être réalisé dans les cultures primitives sur plusieurs points; en Perse, en Mésopotamie, en Arabie. La culture a dû révéler la fécondation par le Blastophaga et faire adopter la caprification qui parait une pratique très ancienne.

De ces observations, il semble logique de déduire que le Ficus carica, comme le plus grand nombre de nos espèces fruitières variables, ne provient pas d’une seule espèce sauvage; mais de plusieurs; qu’il constitue une espèce artificielle créée par les premiers cultivateurs des Ficus comestibles encore existant, d’une manière incontestable à l’état spontané.

Il serait intéressant de refaire cette synthèse en réunissant tous les Ficus de la section Carica et en les laissant s’interféconder.

Jusqu’à ce jour, je n’ai pu me procurer que la forme pseudo-carica de Stirps, F. palmata de Forskal, ce Ficus provient de l’Arar. J’ai séparé les pieds mâles des pieds femelles; ils végètent très bien à Alger, les uns au jardin botanique de l’Université, les autres à 15 km à l’est à la Station botanique de Maison carrée. A Alger, les pieds mâles se comportent comme d’excellents Caprifiguiers, leurs nombreuses figues d’hiver abritent les Blastophaga et les figues mâles d’été laissent échapper des nuées de Blastophaga poudrés de pollen et capables de féconder les figues femelles du figuier du type Smyrne.

A la Station botanique, les sujets femelles fécondés par les Caprifiguiers du F. carica donnent des petits fruits noirs sucrés contenant un très grand nombre de graines fertiles.

Ces graines ou mieux ces fruits fécondés ont été semés et distribués; mais je n’ai pas encore pu observer les caractères des fruits de cette descendance hybride. Au Jardin des plantes de Montpellier, des sujets provenant de croisement sont aussi en observation.

L’hypothèse que j’émets sur l’origine du Figuier cultivé se déduit:

1° De l’incertitude qui a toujours régné sur l’habitat d’un Ficus carica vraiment spontané.

2° De l’existence d’un assez grand nombre d’espèces bien spontanées du groupe F. carica, espèces fécondées par le même Blastophaga donnant à l’état spontané un fruit sucré médiocre, mais comestible.

3° De probabilités de croisements inévitables de ces espèces quand elles sont réunies sur un même point. Cette hypothèse semble confirmée aussi par l’existence d’innombrables variétés dans les cultures.

Ficus palmata Forsk., un Figuier sauvage décrite par Forskal en 1775 à la suite de son voyage sur les côtes de l’Arabie et dont Trabut pense qu’il est une des espèces à l’origine du Figuier cultivé. Forskal étant mort prématurément, son travail a été publié par Vahl en 1790 dans Symbolae botanicae, d’où est extrait ce dessin.